COMME DANS UN SONGE
Etrange c’est la sensation qu’on ressent à la première lecture qui nous pousse à relire, une fois, puis une autre pour s’imprégner de l’atmosphère.
C’est un récit poétique, des fragments qui mêlent une histoire dans ce recueil de poèmes d’un homme qui fait part de ses sensations, secrets, ses envies d’ailleurs, comme une sorte de bilan où se mêle des souvenirs douloureux d’enfance, d’amour perdus de vue, d’accident.
C’est l’évocation aussi de la vie de banlieue et de sa tristesse, de la misère, avec ce vieux voisin peu croisé et qui est mort seul, qui avait pour unique compagnie sa télé et ses nuits d’insomnie sorte de gardien immobile pour l’immeuble. Dans l’impossibilité de parler à force de solitude.
On a aussi la thématique du rendez vous manqué, des retrouvailles entre 2 ex amants dans un café, d’une ancienne histoire d’amour.
Le décor c’est un vieux dancing, avec le souvenir d’un lieu fermé depuis longtemps, lieu de rencontre et d’espoir, de joie, éteint depuis de nombreuses années mais que le narrateur aimerait faire revivre même s’il n’y a jamais été. Un lieu un peu magique avec le leitmotiv du personnage de Lavorel et de cette phrase qui scande la poésie et donne son titre au receuil "je t'emmenerai danser chez Lavorel".
Les souvenirs sont comme des madeleines, des perles qu’on égrène sans vraiment d’ordre mais qui forme comme une petite musique. On a une sorte de fascination pour cette mécanique cette ritournelle qui accroche et qu’on ne quitte pas dans les vieilles boîtes à musiques. Une multitude de personnages, de son entourage, ses amis, comme dans un vieux film super 8 qui déroule lentement les souvenirs. L’évocation des gitans qui incarne un peu la mélancolie comme dans la musique slave et surtout la répétition que quelque chose de grave va se produire. Mais quoi ? La mort ? L’oubli ? Le temps qui passe ?
C’est un joli moment de lecture comme dans une sorte de songe éveillé dont on ne comprend pas tous, tout de suite, les signes et les symboles qui demandent un temps pour être décrypté, approprié.Une Belle écriture comme un souffle, un résumé de vie et de sensations qui nous plongent dans un univers onirique et singulier.
Découverte et plongée dans de la poésie contemporaine agréable même si parfois déroutante, mais c’est ça la force de la poésie ne pas toujours être immédiate, faire ressentir des sensations et des impressions fugitives comme dans un film comme sur une vieille bobine de film.
Pas mon genre de lecture d’habitude, mais découverte intéressante, j’ai bien aimée l’écriture poétique, certains passages, cette nostalgie qui colore le récit comme une sorte de musique slave, avec la répétition que quelque chose de grave va se passer.
Extraits
"Nous parlerons du grand voyage
Bien loin de la grisaille d’ici ».
« Je t’emmènerai danser chez Lavorel
Si c’est bien encore le nom
De cet endroit
Où je ne suis jamais allé mais
J’en ai souvent entendu parler
Et aujourd’hui je voudrais le connaître avec toi. »
« On n’a pas le cœur à déloger les manouches
Qui rêvent avec les yeux à vif
Font corps avec la cime des arbres
Et se chauffent de tout bois
Dans leur insolente caravane
À quoi les gens d’ici
Voudraient foutre le feu
Par un jour de grand froid ».
« On a jamais terminé d’espérer
Une rencontre un regard
Ceci nous ferait tant de peine
De nous voir surveillés par le ciel ».