Rouge atelier bric à book numéro 18

© Yannick Debain

C’était tellement incongru de le voir là, à cet endroit. Ce gros ballon rouge qui s’envolait au pied des immenses livres de verre que forment la BNF. Comme un clin d’œil, un gros nez rouge au milieu du ciel bleu de Paris. Le petit garçon à qui il avait échappé le regarder s’envoler loin de lui.

Légé comme le vent il s’envolait, comme mon esprit. En le voyant s’élever, telle une bulle, j’avais l’impression de voir un nez de clown.

Avec cette petite chose en plastique, qui elle aussi avait un fil mais qu’on passait derrière les oreilles. Comme le ballon de l’enfant, il avait pourtant un pouvoir, malgré sa simplicité, il pouvait aider à s’évader, s’échapper et s’éloigner du quotidien.

Comme une cape de super héros, un nez rouge ça décuple les sensations, l’écoute des autres. On se sent invisible quand on le porte et parfois fier. Comme les enfants à la fête foraine qui tiennent fermement dans leur main la ficelle du ballon que leurs parents viennent de gagner pour eux et qui se sentent les rois du monde. On n’a plus peur de rien, un sentiment étrange pendant quelques instants.

Avec un nez de clown, on peut tout faire, prendre les rôles que l’on veut. Etre un enfant, un animal, un craintif ou un matamore. On peut passer d’une émotion à l’autre, rire aux éclats ou pleurer à chaude larmes. Faire des grimaces ou être neutre, se concentrer sur une lumière une plume ou se prendre les pieds dans une chaise.

On peut singer les puissants en contrefaisant sa voix, en racontant n’importe quoi comme les vrais clowns politiques qu’on imite. Se moquer ou se cacher parfois derrière le masque blanc du maquillage. Devenir un Pierrot rêvassant, un clown triste qui traine sa dégaine sur la piste.

On peut briller de mille feux avec des vêtements grossiers multicolores et ressembler à un Arlequin de Commedia. Des fous rires, des émotions ressenties quand on trouve  enfin son clown sur le plateau, de découvertes acrobatiques parfois dans le jeu. De dépassement, d’apprentissage et de peur aussi.

Accepter d’être la risée des autres pour un instant, d’être ridicule, de révéler une part de soi même exagérée. Le rire mais aussi les blancs, les doutes, les silences quand le nez rouge n’est pas suffisant. Mais aussi provoquer de la joie, de l’émerveillement dans les yeux des enfants quand on les regarde attentivement avec notre nez rouge qui en échange parfois vous serrent dans leurs bras ou s’éloignent rapidement.

Des instants clownesques suspendus qui gonflent d’espoir et nous font sentir comme ce ballon rouge qui s’envole avec le vent : LIBRE.

©eirenamg

Comments

[Nady]

une belle idée d'y voir le nez rouge d'un clown dans ce ballon ! Il faudrait qu'on retrouve plus souvent nos clowns intérieurs dans cette vie pleine de tarés ! Merci pour cette belle évasion !

[Amor-Fati]

Un ballon, un nez, deux artifices pour un même but. Merci pour ce texte.

[Nimentrix]

Jolie inspiration que ce ballon nez de clown qui autorise bien des fantaisies... et la Liberté :-)

[Claude]

Bravo pour ce texte et cette vision nez rouge de clown. Excellente idée. J'aime beaucoup. Et très bien réalisé.